lundi 28 octobre 2013

Session n°1 - Texte d'Emeraud


Louise
 
- C'est de la discrimination ! hurla la voix fluette de Louise.

Elle s'était élevée d'un bond précipité et menaçait le futile professeur d'histoire face à nous de sa pâle et fine main. Sa chevelure dorée se balançait dans l'air moite. Elle me coupa le souffle. J'étais incapable de me mouvoir, paralysé par sa trop stupéfiante perfection et pourtant mon intérieur brulait sauvagement comme la lave d'un volcan. Elle était mieux que tout ce j'avais connu, mieux que toutes ces filles que j'avais observées, mieux que tous ces jeux auxquels j'avais joué, mieux que toutes les clopes qui m'avaient consumé...

Louise me consumait ; mais c'était si doux de se laisser dévorer, de laisser la lave doucement brûler tout ce qu'il a en moi, tant que ça avait rapport avec cette jeune fille au poing ondulant furieusement au dessus de son crâne.

Un pion stoppa le spectacle ramassant sur son passage les mécontentements du public. J'étais mécontent. Personne n'avait le droit d'emmener, si loin de ma vue, de ma vie, la raison de ma perdition. La porte claqua sur une dernière vision de sa veste kakie et elle disparut pendant une éternité. On entendit des cris. Le professeur partit, repartit, bougonna, rebougonna, m'énerva.

Une demi-heure plus tard, le pion revint. C'était un homme haï, ici. On sentait toujours ses yeux qui nous fixaient suspicieusement. Certains le pensaient pédophile, ce pauvre homme, avec son duvet d'adolescent au dessus des lèvres et des lunettes du siècle dernier posé sur le bout du nez. Il avait, ce jour-là, le regard ailleurs et un sourire sadique inscrits sur le visage. Sous chacun de ses pas, le parquet craquait comme le tic-tac d'une horloge, annonçant l'approche d'une mauvaise nouvelle.

Il déclara, l'air faussement navré, que notre camarade avait été renvoyée et qu'il fallait que cela nous serve de leçon à l'avenir. Il avait, trop vite, briser toutes mes langueurs adolescentes. Entre mes côtes, mon coeur implosa. J'avais l'impression d'être devenu une flaque de gadoue dans laquelle le pion sautillait, écrasant à chaque bond mes espoirs trop précipités.

Je ne revis plus jamais Louise.

jeudi 24 octobre 2013

Session n°1 - Texte de Trèfle

Nous jouons un jeu dont je ne connais pas les règles. Je me sens comme un petit pion inutile sur un immense échiquier inconnu.
Il me fixe sans s'arrêter ; mon regard papillonne au hasard du duvet de ses cheveux. Il est troublant de penser que peut être, il ne cligne jamais des yeux. Ils brûlent ma peau frissonnante. Je sens derrière ses iris immobiles un grand volcan près à exploser.
Je suppose qu'il est en train de s'imaginer me découper en morceaux, puis ranger les morceaux dans des sacs poubelles. Je suis mal à l'aise. Je me balance nerveusement, la chaire de mes cuisses s'enfonce alternativement dans la chaise.
Je ne sais même pas pourquoi je reste alors qu'il serait si facile de repartir.
Sûrement qu'au fond, j'aime les âmes noires et sales, pleines de gadoue dans les recoins. Les âmes de psychopathes et de tueurs en série. Je les recherche parce qu'elles me sont familières, un peu comme une vieille voiture qui manque de nous tuer à chaque fois qu'on prend la route mais qu'on garde quand même par nostalgie. J'aime le danger et ce qui sent le souffre.
Des volutes de vapeurs condensée monte du thé brûlant entre nous deux. J'agite suspicieusement ma cuillère dans le fond de ma tasse.
Je me sens disséquée sous son regard scrutateur, découpée jusqu'au fond de mon âme. Mes sentiments sont étalés devant lui sans discrimination, mes pensées les plus intimes sont rendues publiques.
Je ne sais même pas ce que j'attends en restant ici, en acceptant implicitement qu'il me torture ainsi. Probablement de finir dans ces fameux sacs poubelles.


Session n°1 - Texte de Rosemonde


 - Voir les règles du jeu de la session n° 1 -

Sérieux, dans son costard trop grand, il regardait le monde du haut de ses lourdes jambes.
Les autres ils l'appelait le pion. L'homme englué dans sa vie comme dans sa chemise enfilée à la va-vite.
Les autres : ces gosses qui parcouraient l'existence sans encombres, leurs jeux ne s'effectuant à rien d'autre qu'aux coups et aux poings, finissant la plupart du temps dans la gadoue sale qui s'imposait comme une menace après la pluie.
Sérieux, c'était lui. Il était là pour observer la discrimination des sales gosses sur l'asphalte morne.
Suspicieusement, les gosses avalaient du regards leurs ennemis affalés dans la terre.
Ils vivaient la vie comme une compétition, la grande course du marathon pour être encore et toujours le plus fort. Atteindre le nirvana. Le pouvoir dans leurs tripes, tels des volcans de dix ans, foudroyants tout sur leur passage. En attente d'un public. En attente d'une reconnaissance.
Alors quand ils balançaient leurs rages au visage des prototypes humains miniatures, il intervenait. C'était son rôle. Exécuter son pouvoir en pleine face des gamins, repartant penauds mais inlassablement insatisfaits.

Emmitouflé dans le duvet de leur lit, il entendait la mer. Et c'était beau. Le baiser sur la joue de sa femme s'évapora dans les airs. Il pensait aux gosses.

dimanche 20 octobre 2013

Session n°1 - Règles du Jeu

Alors voilà. Une proposition de jeu d'écriture destinés à tous, tout de suite, maintenant. Le principe est simple. Choisir 10 mots dans le dictionnaire, au hasard. Écrire un texte avec ces 10 mots. Libre, de la longueur que vous souhaitez.
Donc on commence. On ouvre le dictionnaire au hasard, pour tomber sur les mots suivants :

- Pion
- Duvet
- Suspicieusement
- Balancer
- Discrimination
- Volcan
- Public/Publique
- Gadoue
- Jeu
- Repartir

A vos plumes, c'est parti !


Même si la session n°2 est en route, vous pouvez toujours participer à la session n°1 !